Une mutation est un changement radical, en profondeur. Dans le domaine du vivant, cela se passe au niveau de l'ADN. Et cela entraîne parfois une métamorphose, c'est à dire une transformation complète, un passage d'une forme à une autre...
Montrer ce passage entre l'avant et l'après, c'est montrer un des processus fondamentaux de la création de nouvelles formes. En art, il est possible de rendre visible ce mécanisme en s'appuyant sur un décalage progressif des formes.
Caricature, J.J. Grandville, XIXe S. Glissement de l'angle facial par basculement de son axe.
Comment naissent les bateaux. Jean Olivier Héron, 1971. Utilisation des changements de forme par la gestuelle jusqu'à créer une analogie formelle avec l'image finale.
Métamorphose I : l’Air et l’Eau (1938), MC Escher. Écartement et rapprochement progressifs des formes et contre-formes dans un mouvement de translation du regard.
Caricature "les poires", Honoré Daumier, 1831. Altération d'une image à l'autre des traits du visage de Louis Philippe, le transformant en poire (symbolisant la bêtise et la complaisance).
L'enchaînement des images permet de créer une impression de mouvement évolutif.
Visages d'art, vidéo créée par traitement numérique d'images fixes, Philip Scott Johnson, 2008.
Le morphing permet un enchaînement fluide et plus naturel des images.
Que ce soit pour créer une image fixe ou en mouvement, la création consiste à remplir peu à peu un espace donné, qui laisse transparaître la chronologie du processus technique. Les phénomènes de propagation, de dissémination, de prolifération sont des gestes créateurs!
Il suivent des logiques particulières, liées à l'intention de l'artiste, aux contraintes physiques et matérielles, ou aux mouvements naturels de la mécanique des fluides ou de perpétuation des espèces vivantes...
L'animation, qui donne l'illusion du mouvement en intégrant la dimension temporelle, permet d'impliquer le spectateur, en faisant de lui le témoin de l'évolution de l'image qui bouge.
A l'inverse, dans les installations, formes privilégiées en art des processus créatifs de contamination et de contagion, c'est le spectateur qui est amené à déambuler, c'est à dire à passer du temps et à bouger, dans un environnement spatial fixe, en mouvement ou en évolution.
Le monde du minuscule est d'une très grande beauté. Les images des micro organismes qui peuplent ces écosystèmes, sorties de leur contexte, peuvent nous sembler abstraites. Invisible à l'oeil nu, les formes naturelles, mais souvent géométriques, des microbes, virus et autres êtres vivants micro cellulaires nous semblent dénuées de références: elles ne sont que des formes!
Bleu de ciel, 1940, Vassily Kandinsky. Tableau abstrait. Huile sur toile. Centre Georges Pompidou, Paris.
Mais dès que nous savons de quoi il s'agit, dès que nous lui donnons un nom, la forme abstraite devient figurative: elle représente bien quelque chose de tangible!
Quelque chose qui jusqu'alors nous était inconnu, que nous n'avions jamais vu. "Nous ne voyons vraiment que ce que nous connaissons, que ce que nous reconnaissons..."
Des artistes et des scientifiques se sont donné pour mission de représenter cet univers fabuleux, afin d'en partager la beauté et de mieux le comprendre. Problème : comment montrer ce qui ne se voit pas?
Image non transformée du coronavirus
Tout d'abord, agrandir à notre échelle humaine en utilisant les microscopes des scientifiques, ainsi que leurs expériences et leurs connaissances, afin de comprendre comment ces formes fonctionnent entre elles.
Choisir une représentation en deux dimensions ou en trois dimensions, un point de vue, des matériaux, des couleurs...
Le choix est subjectif: à cette échelle du vivant, la couleur n'existe pas! Ces organismes sont en effet plus petits que les longueurs d'onde lumineuses...
Même sous un microscope, on ne les voit pas vraiment : on transforme leur ombre en image photographique pour pouvoir les observer, puis celle-ci est modélisée par ordinateur, qui va mettre en place les codes couleurs qui lui ont été programmés!
Diverses modélisations en 2D du coronavirus
Diverses modélisations effet 3D du coronavirus
Ainsi, afin d'informer sans provoquer la panique, les couleurs choisies par les scientifiques pour représenter le coronavirus dans les média pendant la pandémie, sont-elles vives pour attirer l'attention et mettre l’œil en alerte, mais restent harmonieuses et agréables, pour ne pas faire détourner le regard par terreur ou dégoût. Elles semblent inspirées des pigmentations des moisissures, qui nous sont connues dans notre vie quotidienne et dont nous savons nous méfier.
De même, en art, les couleurs et les matières vont être choisies en fonction de ce que veulent leur faire dire les artistes!
Ils vont eux aussi utiliser l'expressivité de ces constituants plastiques, c'est à dire leur propriété à engendrer certaines sensations et émotions, qui seront plus ou moins communes à tous les spectateurs, en dehors des symboliques liées à leurs cultures.
David Goodsell, par exemple, utilise des couleurs pastelles et lumineuses, à l'aquarelle, qui donnent au spectateur une sensation de douceur, de tendresse.
Son objectif est de nous montrer combien ce monde fascinant, qui nous est invisible, nous est intime et vit en symbiose avec nous.
Luke Jerram, quand à lui, a choisi de travailler avec du verre, afin de montrer la beauté géométrique des formes, avec lesquelles on fait jouer la lumière pour les rendre perceptibles. L'aspect dur et froid du verre, ses propriétés de transparence, de matité et de brillance, son aspect artificiel, fragile, provoquent une sensation ambiguë, à la fois de grande délicatesse et de danger révélé.
Les élèves de sixième et de cinquième ont cherché eux aussi les formes et les couleurs qu'ils donneraient à la représentation d'un virus qui fait peur, afin d'en montrer l'agressivité et le danger.
Pendant cette période de confinement, petit rituel hebdomadaire: Silence, on dessine! L'oeuvre de la semaine.
Histoire de se cultiver, de se changer les idées, d'exorciser ses peurs, de garder de bonnes habitudes de travail.
Quelques travaux d'élèves: un régal pour les yeux!
Le point de vue, appelé cadrage dans certains domaines artistiques tels que la photographie ou le cinéma, est un des éléments de la composition d'une image.
Cela consiste à placer l'oeil du spectateur dans un certain cadre (les limites de l'image), selon une distance, un angle et une orientation vis à vis du sujet, qui va induire une sensation particulière, avec un impact psychologique plus ou moins important.
Références des films d'Alfred Hitchcock dont sont issues les images: 1. L'ombre d'un doute (1943) 2. Fenêtre sur cours (1954) 3. La main au collet (1955) 4. Le faux coupable (1956) 5. Sueurs froides (1958) 6. La mort aux trousses (1959) 7. Psychose (1960) 8. Les oiseaux (1963)
Le champs de l'image est l'espace de représentation que l'on voit dans le cadre. Il correspond au champs de vision que l'on impose au spectateur, avec une certaine ouverture (du grand angle au téléobjectif ), un format d'image (proportions du cadre) et une orientation (place et direction du regard du spectateur).
(1) Champs: vue d'une scène
(1) Contre champs: vue opposée de la même scène
(2) Hors champs:ce qui n'est pas dans l'image, mais que l'on imagine en dehors de son cadre
(6) Avec des effets de reflets, champs, contrechamps et hors champs peuvent se superposer, s'incruster, se suggérer, ...
Construction des plans:
L'éloignement des plans successifs dans l'image donne une impression d'espace qui change selon le cadrage. Les sujets ont un rapport de proportion, vis à vis de l'espace environnant et du cadre, appelé échelle des plans.
(8) Éloignement des plans: les plans se superposent les uns derrière les autres et diminuent de taille vers le lointain. Ils créent ainsi une impression de profondeur dans l'image, les premiers plans étant les plus proches du regard du spectateur.
Angle de vue: il permet de tourner autour du sujet, ce qui procure une perception très différente d'un angle de vue à l'autre.
Verticalement, selon un axe horizontal:
(4) Plongée: vue d'en haut (sentiment de domination)
(4) Contre plongée: vue d'en bas (sentiment de vulnérabilité)
Les effets peuvent être amplifiés jusqu'à une perte des repères spatiaux conduisant à un certain malaise.
(5) Zénith: juste au dessus du sujet
(2) Da sotto in su: juste en dessous du sujet
Horizontalement, selon un axe vertical:
Alfred Hitchcock. Vue de face
Alfred Hitchcock. Vue de profil
Alfred Hitchcock. Vue de trois quart
Alfred Hitchcock. Vue de dos
Ces angles de vue impliquent plus ou moins le spectateur dans la scène, selon des modalités différentes (voyeur, participant, pris à témoin...etc...)
Tous ces éléments liés aux points de vue provoquent des effets particuliers de perspective:
Alfred Hitchcock. Perspective amplifiée: les plans s'éloignent les uns des autres: l'espace parait plus grand
(2) Raccourci: les plans se rapprochent les uns des autres, l'espace est écrasé, il parait plus petit
Non, ce célèbre tableau ne représente pas la révolution française!
En 1830, Charles X veut changer les lois électorales et supprimer la liberté de la presse: le peuple se soulève, les "trois glorieuses" de la révolution de juillet entraînent sa démission et l'accès au pouvoir de Louis Philippe. Delacroix décrit une scène de barricade entièrement symbolique, à laquelle il donne une apparence de réalité moderne, emblématique du romantisme pictural.
(Cliquer ICI pour comprendre l'histoire par l'analyse de l'image).
La liberté guidant le peuple, Eugène Delacroix, 1830
Cinq ans après les attentats contre Charlie Hebdo, il est bon de se souvenir que sans liberté d'expression, pas de démocratie. Quitte à choquer certaines sensibilités...
La liberté sera toujours plus forte, Plantu, dessin de presse pour le journal le Monde, 9 janvier 2015
Clochers et minarets sont des éléments importants dans les architectures des églises et des mosquées.
Par leur hauteur, ils sont symboliquement une recherche d'élévation spirituelle vers le ciel.
Points de repère géographiques et identitaires, ils marquent le paysage de leur présence, comme un rappel à la dimension religieuse de la vie.
Cependant, s'ils sont pensés pour être vus de loin, ils sont surtout conçus pour être entendus de loin. Leur fonction principale est en effet de propager un signal sonore destiné à appeler les fidèles aux différents actes du culte (prière, cérémonies, offices...).
La forme, la hauteur et l'emplacement des clochers et minarets se mettent au service de leur fonction.
Vue de Rouen, la ville aux cents clochers, Claude Monet, 1892 (style impressionniste)
Dans les pays catholiques, les cloches sonnaient les différentes heures des offices, du haut des clochers, avec un chant de cloche différent, pour appeler les fidèles. Ceux des Primes, Sexte et Vêpres étaient souvent associés à l’Angélus (Ave Maria).
Cette tradition n'est plus usitée en France depuis la Révolution et la confiscation des églises par l'état laïc. Les cloches des églises sonnent, en fonction des accords entre les mairies et les riverains, les heures, demi heures ou quarts d'heure, ainsi que les offices cérémoniels. Certains monastères ou chapelles privées sonnent encore les heures liturgiques.
Texte de l'Ave Maria:
Je vous salue Marie, pleine de grâce. Le Seigneur est avec vous. Vous êtes bénie entre toutes les femmes et Jésus, le fruit de vos entrailles est béni. Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort.
L’Angélus, Jean François Millet, 1869 (style réaliste)
Pour les pratiquants catholiques, le temps de la journée est marqué par la Liturgie des heures canoniales: sept prières quotidiennes (offices).
Les clochers sont le plus souvent placés côté façade du bâtiment, par où entrent les fidèles, car si le son des cloches est un appel, il est aussi un accueil.
L'appel à la prière chez les musulmans (Adhan) est un chant lancé du haut des minarets par le Muezzin, tourné vers la Kaaba. Ce chant en arabe doit être bien audible et pouvoir être entendu de tous les cotés: de ce fait, lorsque les mosquées ont plusieurs minarets, ils sont placés le plus souvent sur les points cardinaux de l'édifice.
Le muezzin. Jean Léon Gérome, 1866 (style orientaliste)
Texte du chant (avec des variante en fonction des rites sunnites ou chiites)
arabe
Français
4 fois
الله أكبر
Allah est le plus grand
allāhu ākbar
2 fois
اشهد ان لا اله الا الله
J'atteste qu'il n'y a de dieu qu'Allah
Ashadu an lâ ilâha illâ Llâh
2 fois
اشهد ان محمد رسول الله
J'atteste que Muhammed est le messager de Allah
āš'hadu ānna mūḥammad ār-rasūlu-l-lāh
2 fois
حي على الصلاة
Venez à la prière
ḥayyā ʿalā-ṣ-ṣalāt
2 fois
حي على الفلاح
Venez à la félicité,
ḥayyā ʿalā-l-falāḥ
2 fois
الصلاة خير من النوم
La prière est meilleure que le sommeil.
aṣ-ṣalātu ḫayru min an-naūm
2 fois
الله أكبر
Allah est le plus grand.
allāhu ākbar
1 fois
لا اله الا الله
Il n'y a de vraie divinité hormis Allah
lā ilaha illā-l-lāh
Eugène Girardet: La prière du soir, à Bou-Saada, Algérie. 1897. Peinture à l'huile sur toile (73 x 100 cm) de style orientaliste
Les 5 prières de chaque jour (Salat) chez les musulmans:
La prière du Fajr (prière de l'aube)
La prière du Dhuhr (prière de la mi-journée)
La prière de Asr (prière de l'après-midi)
La prière du Maghrib (prière du coucher du soleil)
A la suite du festival de la photographie de Nantes (QPN: quinzaine photographique nantaise) il a été demandé aux élèves de montrer leur conception du "Fun" sous la forme d'un projet numérique qui détourne "Le baiser de l'Hotel de ville" de Robert Doisneau...
Par la couleur, la lumière, les détails, les objets, les formes, le cadrage, les textures... comment transformer la connotation d'une image? Comment les éléments plastiques jouent-ils un rôle essentiels dans la représentation et la signification des images?
Cliquer sur l'image pour voir les travaux des élèves